Avec près d’un demi-siècle de données récoltées, le monde de l’assurance ne peut que témoigner de la gravité croissante des événements climatiques qui touchent la France et le monde. Seules solutions : renforcer la prévention et l’éducation aux risques naturels, revoir les normes de construction et mieux partager l’information entre public et privé.
La réalité du réchauffement climatique
Dans le monde de l’assurance des habitations, des entreprises et des terres agricoles, le constat est unanime. Le dérèglement climatique augmente à travers les années. Selon les principaux réassureurs mondiaux, on est passé, à l’échelle planétaire, de 50 catastrophes par an dans les années 70 à près de 200 dans les années 2010.
Au niveau de la France, le constat n’est pas mieux : on est passé d’un coût global des événements climatiques de 1 milliard d’euros par an en 1980, à une moyenne annuelle de près de 3 milliards sur les 10 dernières années.
Et la Fédération française de l’assurance se prépare à un doublement des sinistres d’ici 25 ans.
La répartition territoriale de ces sinistres climatiques entre 89 et 2018 place quatre départements sur le devant de la scène. Le Tarn-et-Garonne, l’Aude, le Lot-et-Garonne et le Tarn rassemblent le plus de tempêtes, d’inondations ou de sécheresse en métropole.
Bien évidemment, l’assurance habitation en subit les conséquences avec une hausse annuelle de la cotisation de 3 %, entre 2000 et 2018, contre +1,4 % des prix à la consommation et +1 % pour l’assurance automobile.
Heureusement pour l’outre-mer, comme La Réunion, où les sinistres majeurs représentent un risque plus important qu’en métropole, la mutualisation joue à plein. Sans ce rôle central de la réassurance, preuve de la solidarité entre territoires, le risque climatique ne serait plus assurable chez nous.
Trois garanties face à la nature
Avec un volume de près de 4 milliards d’euros de cotisations en 2018, le monde de l’assurance propose trois types de couverture pour se protéger des événements naturels.
En premier, la garantie catastrophe naturelle entraîne une surprime, fixée par l’État, de 12 % sur les assurances de dommages aux biens, et de 6 % sur les garanties vol et incendie d’une auto ou d’une moto. Cela représente, en moyenne, 26 euros pour une habitation.
La garantie tempête vient ensuite. Obligatoire dans tous les contrats multirisques, le prix de cette garantie TGN (Tempête, Grêle, Neige) est libre et tourne autour de 26€ pour les habitations, 35€ pour les commerçants et artisans, et 290€ dans le monde agricole. A noter que les garanties grêle et neige ne sont pas toujours incluses dans les contrats de particuliers.
Enfin, le monde agricole, avec près de 150 000 contrats, dispose, en gros, de deux couvertures spécifiques. Un contrat grêle couvre les cultures de céréales, les vignes, les fruits, le colza… Et une multirisque climatique sur culture s’intéresse plus aux grandes cultures, qu’elles soient maraîchères ou fruitières, avec des primes qui peuvent dépasser les 4,600 euros.
Une addition salée à tous les niveaux
Sur un coût total des sinistres climatiques de 3,4 milliards d’euros en 2018, les tempêtes ont coûté le plus cher, suivi des inondations et de la sécheresse.
Ces trente dernières années, on compte chaque année un événement naturel coûtant plus de 500 millions d’euros. C’est certes moins que les 12 milliards d’euros des tempêtes Lothar et Martin de 1999, mais tout de même.
L’arrêté « catastrophe naturelle » a été publié au Journal officiel au moins une fois par an, dans les 35 000 communes françaises, depuis 30 ans. 56 % sont dus à des inondations et 20 % à des mouvements de terrains.
Le Pas-de-Calais caracole en tête pour les inondations avec 92 arrêtés en moyenne chaque année. Concernant la sécheresse, la Haute-Garonne se distingue avec 66 états de catastrophes naturelles déclarés.
Les assureurs face au monde d’après...
Au pied du mur du dérèglement climatique, la France doit affronter 3 défis principaux, selon le rapport « Les assureurs face au défi climatique », paru en 2020 :
- L’outre-mer, avec seulement 52 % des résidences principales couvertes par une assurance habitation ;
- Les exploitations agricoles, avec seulement 30 % des terres assurées pour les dégâts du climat, hors grêle ;
- Une quasi absence de culture du risque naturel, qui ne pèse pas lourd dans l’aménagement du territoire ou le bâtiment.
Naturellement, la prévention vient à l’esprit. L’information de la population sur les risques et les « gestes qui sauvent » s’impose… En théorie, car, en pratique, on y pense, et puis on oublie. Combien de communes ont posé des repères de crues, pourtant obligatoires. Combien de collectivités ont élaboré un plan communal de sauvegarde qui régit toutes les mesures urgentes en cas de sinistre ? Même pas 40 %.
Ensuite l’éducation, la formation et la circulation de l’information ont encore des progrès à faire. Le secteur du bâtiment va devoir apprendre à « bien construire » et à accepter des normes de construction qui tiennent compte des risques naturels.
Enfin, nul doute qu’un partage de l’information plus efficace entre tous les acteurs publics et privés aiderait grandement à une mobilisation autour de la culture du risque naturel.