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Opioïdes : morts sur ordonnance

Aux Etats-Unis, les opioïdes de synthèse ont fait l’objet d’un marketing médical massif de la part de certains laboratoires pharmaceutiques. Mais, ces médicaments pour soulager les douleurs chroniques sont aussi addictifs. L’accoutumance et la dépendance à ces opioïdes ont entraîné des centaines de milliers de mort par overdose.

Opiacés et opioïdes : antidouleurs ou dépendance mortelle

Les opiacés sont des substances dérivées de l’opium, produit de la culture du pavot. La référence est la morphine, d’où vient l’héroïne. Codéine et Oxycodone en font partie.

Et on appelle opioïdes des molécules ayant l’effet de l’opium, mais dont la production se fait par synthèse. On trouve dans cette catégorie : la Méthadone, le Tramadol et le Fentanyl…

Les opioïdes ont des effets analgésiques et sédatifs. On les prescrit pour soulager une douleur aiguë ou chronique, notamment chez les malades du cancer.

Mais ce sont aussi des substances dites « psychoactives » : elles agissent sur certains récepteurs du cerveau. D’où leur qualité de produit réduisant la douleur. Autre effet : elle provoque un sentiment de détente, voire d’euphorie.

Les opioïdes sont donc en même temps des médicaments et des drogues.

En fonction de la dose administrée et de la fréquence, ces molécules proches de la morphine déclenchent souvent un sentiment de dépendance, en quelques prises seulement. Non seulement on ne peut plus s’en passer, mais l’état d’addiction créé une tolérance physique au produit.

Il faut alors augmenter les doses pour faire passer la douleur ou aboutir à l’effet qu’on en attendait. L’autre solution est de passer à un produit plus puissant.

Les dangers du marketing médical

Aux Etats-Unis, on utilise la morphine contre la douleur depuis la guerre de Sécession. Dans les années 1970, ce sont les morts par surdose de Janis Joplin ou Jim Morrison qui font découvrir au grand public le phénomène de l’addiction.

Dans les années 1990 arrive la crise des opioïdes, avec la mise sur le marché de l’OxyContin, lancé par le laboratoire Purdue Pharma. Recommandé pour les douleurs sévères (cancer...), ce médicament est aussi préconisé dans un panel plus large de douleurs, avec l’accord de la Food and Drug Administration.

Purdue se lance alors dans une campagne de communication à grande échelle. N’hésitant pas à masquer les chiffres d’addiction, sa campagne de marketing médical encourage les médecins à prescrire l’OxyContin. Logiciels médicaux truqués, séjours tous frais payés pour les médecins… Tous les coups sont permis.

C’est l’époque où explosent les prescriptions pour les antidouleurs opioïdes. Et le marché noir détourne l’OxyContin pour ses effets euphorisants.

Entre 1996 et 2001, les prescriptions d’opioïdes passent de 300 000 à plus de 14 millions !

Les médecins généralistes étant encore peu formés sur la dépendance, ce n’est qu’en 2006 que le corps médical s’alarme de l’explosion du nombre de surdoses. Mais un grand nombre de patients, victimes d’addiction et contraints à un sevrage forcé, se tourne vers l’héroïne et le fentanyl.

Car, avec 5 % de la population mondiale, les USA consomme 80 % des opioïdes.

On estime qu’en 20 ans, la promotion agressive de médicaments anti-douleurs, comme l’OxyContin, a provoqué plus de 500 000 morts par overdose aux Etats-Unis.

Deux millions d’Américains sous dépendance

En février 2021, le cabinet de conseil McKinsey, qui a Purdue comme client, accepte de verser 573 millions de dollars pour arrêter les poursuites judiciaires. En juillet, Johnson & Johnson, l’un des fabricants de vaccins ARN messager contre le Covid, s’engage à payer 5 milliards de dollars sur 9 ans. Suivis par les pharmacies et les distributeurs qui préfèrent débourser 50 milliards de dollars.

Mais cet argent ne change rien aux millions d’Américains devenus dépendants. Souffrant de douleurs chroniques, comme les vétérans du Viet-Nam, ils sont terrifiés à l’idée d’un retour de leurs souffrances initiales. Et le sevrage est aussi souvent très douloureux.

Or la mise en place de traitement de substitution exige des milliards de dollars pour en financer l’accès. Et les assurances acceptent rarement les remboursements.

Sans parler de la formation indispensable des médecins. Car ils sont nombreux à paniquer et à stopper le renouvellement des ordonnances pour des opioïdes. Sans médicament de remplacement, de nombreux patients se tournent alors vers les trafiquants pour avoir leur dose.

C’est là que le commerce clandestin de vraies et fausses pilules d’OxyCodone devient florissant. Et l’arrivée sur ce marché parallèle du fentanyl n’arrange rien. Car cette molécule encore plus puissante est très facile à fabriquer. Elle est devenue la principale cause de décès par opioïdes aux USA…

En effet, les trafiquants n’hésitent pas à l’ajouter à l’héroïne, le fentanyl étant beaucoup moins cher. Mais, en ne prévenant pas leurs clients, ils provoquent de nombreuses surdoses, comme celle qui causa la mort de Prince en 2016.

En France, la Haute Autorité de la Santé a tenu à publier en mars 2022 une recommandation de bonne pratique : « Bon usage des médicaments opioïdes : antalgie, prévention et prise en charge du trouble de l’usage et des surdoses ».

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